Mystérieux marais

Le département de Charente Maritime possède plusieurs zones marécageuses parmi les plus importantes de France. Elles se situent autour de Rochefort et principalement dans les estuaires des fleuves Charente et Seudre. Dans le bassin de Marennes Oléron ce sont plus de 26.000 hectares qui sont ainsi protégés.

L'île d'Oléron elle-même conserve encore un beau patrimoine naturel marécageux. Ces marais peuvent être salés, saumâtres ou doux. Tout dépend s'il communiquent beaucoup, un peu ou pas du tout avec l'océan au moment des marées.

Ils ont été façonnés à la fois par les caprices de la nature grâce aux dépôts alluvionnaires de l'océan et des deux fleuves et aussi par l'homme depuis le moyen-âge pour l'exploitation du sel, activité très lucrative. 

 

 

Oléron marais
Marais salant au Douhet

Allez donc savoir pourquoi de tous les milieux naturels, de tous les paysages, de tous les sites, c'est dans les marais que je me sens heureux, à l'aise, chez moi!

Allez donc savoir pourquoi! 

Moi, je ne cherche pas, j'y vais et je suis bien.

Mais comme la montagne ou la pleine mer, le marais se mérite. Il ne s'offre pas, il se gagne.

J'ai mis des mois à trouver la porte de mon petit terrain de jeu et des années à chercher la clé de cette porte. Maintenant il me reste des enfilades de pièces à découvrir au fil des saisons, au fil de la chance, au fil des envies, au fil du temps.

Mais l'aurai-je ce temps?

Bien qu'il reste encore des hectares de bois, prairies, dunes et marais, la pression foncière et touristique me fait craindre le pire à brève échéance pour ces zones n'entrant pas dans un domaine de protection.

 

Le marais, ce marais où je vous emmène, est un écosystème à la fois fragile et original, l'un des plus complexes qui soit.

C'est une vaste zone humide où s'entremêlent plans d'eau libre, canaux, roselières. Cette zone humide est elle-même cachée au milieu de prairies, de petits bois, de landes, de buissons souvent impénétrables.

Il n'est séparé de la mer que par le cordon dunaire, la mer est là toute proche, elle gronde à la porte mais n'entre pas.

 

Oléron marais

 

Si vous connaissez un peu les marais d'Oléron, vous constaterez que mon terrain de jeu ne ressemble pas à l'image du marais côtier typique: plat, ouvert et rarement boisé.

Oléron marais
Marais du Douhet

 

Il ressemble plutôt à çà!

Oléron marais

 

Mais reprenons plutôt l'histoire au début.

De loin le marais ressemble à tout ...sauf à un marais. Pour mieux surprendre, il souhaite se montrer comme une lande parsemée de bosquets. Une lande aussi humide en hiver que sèche l'été.

Oléron marais

 

Une lande où poussent glaïeuls et orchidées, où chantent fauvettes et rossignols, où se nourrissent chevreuils et papillons.

Oléron marais

 

En approchant, les premières zones humides apparaissent, les bottes trouvent l'eau, la roselière cache l'horizon, les pieds enfoncent...les moustiques attaquent.

Il est alors temps de s'arrêter. Le marais est bien là, devant moi, secret, mystérieux, insolite.

Les premières années, je butais sur cet obstacle , de l'eau souvent au dessus des bottes, frustré de ne rien voir derrière cet impénétrable rideau végétal.

A force de patience et de persévérance, j'ai trouvé une petite porte, puis une autre. Je me suis frayé un chemin discret à travers la roselière plus haute que moi, prenant soin de ne rien déranger ni la flore, ni la faune.

Oléron marais

 

Une fois cette première porte franchie, sans bruit, pas à pas, je change d'univers guidé par les bruits étranges que produisent les habitants de ces contrées reculées.

J'ai quitté la civilisation pour enfin découvrir le marais vierge. 

Oléron marais

 

Envoûté par cet espace intact, il m'arrive d'y passer des heures avant de reprendre un chemin qui n'existe pas.

Oléron marais

 

Un sentier souvent ponctué de....

Oléron marais

m'obligeant à rebrousser chemin.

 

Une piste entrecoupée de roselières impénétrables, refuges d'espèces trop fragiles pour supporter ma présence.

Oléron marais

 

Un sentier parfois s'entrouvrant.

Oléron marais

et tout de suite se refermant.

 

Au milieu d'un bosquet de saules, se cache un autre sanctuaire.

Oléron marais

qu'il me faut contourner largement.

 

Pour enfin arriver près de la seule étendue d'eau libre.

Oléron marais

 

Jusqu'à présent vous avez raison de penser que ce marais est désert. Je vous l'ai montré tel qu'il apparaît. Je vous l'ai dit, le marais ne s'offre pas: il se mérite.

Ce n'est ni un jardin botanique, ni un zoo. Il sait cacher ses trésors dans un labyrinthe aquatique et végétal.

Ici, l'homme n'est pas chez lui, je ne suis pas chez moi. 

J'emprunte des couleurs, des odeurs, des instants de vie, des images fortes en émotion.

Et lorsque j'emprunte, j'aime restituer intact ce que l'on m'offre.

Alors, souvent je m'interdis d'aller plus avant, de couper une branche qui me gêne, de m'approcher d'un site nidification.

Les seuls souvenirs que jen ramène sont dans mes yeux, dans mon coeur et, pour vous, dans ces images.

Vous avez visité mon terrain de jeux, je vais maintenant vous présenter quelques locataires.

 

Au début du printemps, la marais prend une couleur jaune.

Oléron marais

 

Puis, si chez vous les arbres se couvrent de feuilles vertes, ici ils se parent de plumes blanches.

Oléron marais

 

Loin des regards curieux, ces plumes blanches donnent naissance à de jeunes plumes blanches qui se regroupent dans une nurserie improvisée pour apprendre la vie qui sera la leur.

Oléron marais
jeunes aigrettes

 

Puis s'envolent et reviendront nicher où elles ont vu le jour.

Oléron marais
Aigrette garzette

 

Comme voisin de palier, l'aigrette a choisi un cousin spécialisé dans le transport de matériaux. Sympa le voisin mais un peu bruyant!

Oléron marais
Héron cendré

 

En plus, il se lève tôt pour nourrir sa famille et quand il rentre, tout l'immeuble le sait.

Oléron marais
Héron cendré

 

Beaucoup plus rare, le héron pourpré ne vient qu'en visiteur, souvent le dimanche pour partager le gâteau.

Oléron marais
Héron pourpré

 

Plus discret mais bien présent, le héron garde-boeufs a revêtu son plumage nuptial pour attirer les "meufs".

Oléron marais
Héron garde-boeufs

 

Et il s'admire, il se trouve beau, irrésistible!

Oléron marais
Héron garde-boeufs

 

Pour les occasions uniques, un majestueux représentant de la famille des grands échassiers vient partager le repas des cousins. "Une ou deux grenouilles et je repars, j'ai de la route."

Oléron marais
Cigogne blanche

 

Mais dans la brume matinale, les oiseaux ne sont pas les seuls locataires du marais.

Oléron marais

 

Un rongeur originaire d'Amérique du sud a fait du marais son paradis. Cet herbivore à dents orange mérite plus son vrai nom de myocastor que celui de ragondin.

Oléron marais
Myocastor

 

Pour le bien-être des locataires, le décor de la propriété a été confié à un artiste dont voici quelques oeuvres choisies au hasard dans son catalogue.

Oléron marais
Glaïeul d'Italie
Oléron marais
Lychnis flos-cuculi
Oléron marais
Iris
Oléron marais
Orchidée ophrys bécasse
Oléron marais
Orchidée orchis pyramidal
Oléron marais
Orchidée sérapias à petites fleurs
Oléron marais
Orchidée ophrys abeille

 

Bien entendu, ces plantes attirent et hébergent tout un cortège d'insectes, qui eux-mêmes servent parfois de gâteau apéro à nos goulus piafs.

 

Le bourdon qui boulotte.

Oléron marais

 

La mouche qui picole.

Oléron marais

 

L'araignée qui braconne.

Oléron marais

 

Le méloé qui fait n'importe quoi, pauvre bête!

Oléron marais

 

Le papillon qui papillonne comme à son habitude.

Oléron marais

 

Quant aux libellules, elles ne libellent pas ce qui ne voudrait pas dire grand chose.

Oléron marais
Lestes virens

 

Le nom générique de "libellule" est donné à tort à ces bestioles volantes tout comme le "frigidaire" n'est pas le terme générique des appareils qui produisent du froid. Elles forment l'ordre des Odonates, lui même divisé en Zygoptères et Anisoptères. En général, les zygoptères sont de petite taille (demoiselles) et  les anisoptères plus grands et plus robustes.

Je vous en parlerai plus longuement quand vous serez sages. 

Oléron marais
Ischnura elegans
Oléron marais
Crocothemis erythraea

 

Avant de se quitter, suivez-moi à travers la roselière. Plus un bruit, plus un geste, beaucoup de patience et regardez ce qu'ils font dès que vous ne les surveillez plus.

 

La Bernache du Canada expérimente le décollage vertical, ce qui paraît utopique pour cette grosse oie de 5 kilos.

Oléron marais
Bernache du Canada

 

Le Grèbe castagneux n'écoute que son ventre et file au resto.

Oléron marais
Grèbe castagneux

 

La Foulque macroule quitte son nid caché dans la roselière pour un défilé sur le podium.

Oléron marais
Foulque macroule

 

Quant au couple de canards colvert...ben oui, allons-y, ils sont en pleine tentative de reproduction!

Oléron marais
Canard colvert

 

Le lendemain, je revois Madame Colvert qui a échappé à la noyade.... et à son conjoint.

Oléron marais
Canard colvert

 

Quelques semaines plus tard, je constate qu'elle n'a pas échappé à la charge d'une famille nombreuse!

Oléron marais
Famille colvert

 

Allez, demi tour, il est temps de laisser le

Oléron marais

marais en paix sous l'oeil atentif des cormorans, vigiles haut perchés sur leur arche.

Oléron marais

 

Vous avez aimé? C'est le marais tel que je le vois, tel que je le vis.

En images